L’ontologie, le matérialisme, et l’ésotérisme
Pourquoi écrire ce texte ?
Le Mallouestan est à l’intersection d’un collectif, d’un territoire et d’une vision politique. La réalité de ces différents aspects dépend d’un rapport au monde qui les sous-tend. Les visites régulières sur le lieu nous ont confirmé que ce rapport au monde n’est pas ubiquitaire [partagé par touste], notamment aux niveaux les plus fondamentaux. Ce texte a pour fonction d’éclaircir ce rapport au monde à ce niveau (fondamental) et de répondre à de nombreuses questions qui nous sont posées à cet égard. Il nous semble effectivement important d’être aussi clairs que possible sur nos positions, comme le matérialisme, et nos oppositions, comme celle à l’égard de l’ésotérisme, sans pour autant en tronquer les nuances.
Ce texte, tout comme les autres que nous avons écrits abordant notre vision, notre cadre ou nos objectifs, permet de partager et de rendre disponibles nos réflexions et pensées. Cette substance, une fois accessible, permet également de la rendre examinable et critiquable. Effectivement, un de nos objectifs est certes de les partager, mais nous n’envisageons aucunement ces contenus comme étant immunisés contre nos méprises ou erreurs. Il nous semble donc important de les faire évoluer au travers des regards extérieurs que ces textes, notamment celui-ci, rendent possibles. Nous écrivons donc ce texte pour diverses raisons : nous souhaitons qu’il soit accessible, instructif et régulièrement remis en question, mais également écarter les caractérisations de type homme de paille [une caractérisation fausse en simplifiant ou stéreotypant une position] nous prêtant à tort des positions simplifiées sur ces sujets.
Qu’allons nous aborder exactement?
Nous allons aborder différentes positions fondamentales du Mallouestan. Premièrement, notre vision cosmologique, c’est-à-dire quelles règles, selon nous, régissent l’univers, puis ontologique, c’est-à-dire ce que nous considérons constituer la réalité. Cela peut paraître très abstrait, mais ces points sont bien plus importants qu’ils en ont l’air. Nous allons le voir par la suite. Deuxièmement, nous allons examiner notre position matérialiste et notre vision de la méthode scientifique. Troisièmement, nous allons expliciter et apporter les nuances nécessaires pour mieux décrire notre opposition à l’ésotérisme ce qui englobe nottement pour nous, le New Age, la sorcellerie et le chamanisme, les croyances énergétiques, la théosophie et les religions.
Pourquoi en parler, quels enjeux ?
Vivre en collectif implique de nombreux échanges, y compris parfois des échanges conflictuels ou même existentiels pour le collectif en question. Il est donc important de partager des moyens de communication fonctionnels où les concepts utilisés et partagés soient compris par les différent-es acteurices de manière similaire. En effet, plus ces concepts sont interprétés différemment, plus les échanges deviennent complexes, comme si deux personnes cherchant à communiquer ne parlaient pas la même langue.
Dans le cas de conflits, ces difficultés sont démultipliées. La communication est difficile, certes, mais cela va au-delà. Si l’on ne comprend pas où se situent les personnes en face, si l’on ne partage pas du tout leur vision du monde, il devient difficile d’avoir l’empathie [la capacité de se mettre à la place de l’autre] nécessaire à la résolution du conflit. Pourtant, cela n’est pas dû à un manque de volonté, ni à une forme de chauvinisme philosophique [rejet/discrimination dû à un désaccord], mais bel et bien à une incapacité sociale. Effectivement, si l’on ne comprend pas comment la personne en face perçoit, ressent et vit le monde, on ne peut pas efficacement se mettre à sa place et, de fait, être suffisamment en empathie.
Pour pallier ce problème, il existe plusieurs solutions. La première est de prendre le temps d’expliquer et d’écouter les positions des membres d’un collectif en amont, au moment de constituer le groupe, par exemple. Une autre est de faire collectif avec des personnes partageant suffisamment notre rapport au monde. Dans tous les cas, ce rapport au monde est central, et c’est là qu’interviennent, entre autres, la cosmologie et l’ontologie. Ce sont des composants fondamentaux d’un rapport au monde, avec un troisième qui est l’axiologie [les valeurs considérées comme souhaitables] (différents textes que nous écrivons décrivent, entre autres, l’axiologie du Mallouestan).
La cosmologie est la façon dont on envisage l’univers et les lois qui le constituent. Par exemple, une personne chrétienne considère, à différents degrés, que Dieu est une partie constituante et à l’origine de l’univers qui nous entoure, et, de fait, qu’il a une influence sur ce qui s’y passe. Certain.es pensent que le monde est façonné par l’esprit, et qu’il n’y a donc pas de limite à ce qui peut s’y produire. D’autres encore partagent une vision scientifique d’un monde régi uniquement par des lois physiques. Voilà différents types de cosmologies.
L’ontologie, pour sa part, s’intéresse à ce qui existe, à ce qui est. Certaines personnes considèrent que ce qui existe vraiment est ce qui resterait si tous les humains disparaissaient subitement. D’autres, au contraire, considèrent que c’est l’humain qui façonne la réalité et que ce qui est perçu est obligatoirement vrai. D’autres encore pensent que ce qui ne peut être réduit à une expression scientifique ou mathématique n’existe pas réellement. Autant de façons de voir le monde.
Ces notions semblent probablement encore très abstraites, mais, en fonction de la manière dont les personnes se positionnent, certaines discussions ou certains conflits deviennent, comme expliqué ci-dessus, très difficiles à résoudre. Prenons un exemple.
Imaginez, au sein d’un collectif, un conflit autour de l’alimentation. Une personne, appelons-la Thomas, souhaite ajouter régulièrement une huile essentielle de Tea tree dans la nourriture collective. Mais une autre personne du collectif s’y oppose fermement, appelons-la Paul. Thomas est partisan de l’aromathérapie et des bienfaits des huiles essentiels, il pense qu’il est essentiel pour sa santé de consommer des huiles essentielles. De son côté, Paul n’adhère aucunement à cette vision.
On pourrait penser que ce conflit est simple à résoudre. Paul peut montrer à Thomas un article indiquant la toxicité de l’huile de Tea tree. Mais si Thomas ne croit pas l’article et n’adhère pas à une vision scientifique du monde alors ce qui vaut pour Paul n’as pas de poids pour Thomas et le conflit n’as que très peu d’issues. Autrement dit, de part leurs visions fondamentalement différentes ils auront peu de terrains communs pour se convaincres.
Cet exemple est plus commun qu’on ne le pense et peut se décliner de multiples façons. Ici, le cadre était un collectif, mais la substance du conflit serait tout aussi compliquée dans le cas d’un groupe d’ami-es, d’un couple ou de toute autre dynamique de groupe. Ce que l’on vient d’évoquer est donc un enjeu de communication et de cohabitation.
Le prochain eujeu concerne l’intrication de ces positions avec la culture dominante. Par exemple, de nombreuses pensées ésotériques sont centrées sur l’individu et son bien-être, faisant écho à, et marchant main dans la main avec, la forme très libérale du capitalisme moderne. Chaque culture, chaque pratique, et croyances est un possible marché. Un marché de bien comme le cas des pierres ou des huiles essentielles, et des marchés de services comme dans le cas des soins, des thérapies ou des formations. Ces divisions aussi subversives qu’elles se considèrent sont souvent extrêmement bénéfiques au capitalisme. Cette intrication au capitalisme rend l’organisation politique difficile. Un texte détayant, entre autres, cet enjeu a été écrit s’intitulant “Antilibéralisme”.
La difficulté à s’organiser politiquement, limitant les différentes luttes sociales, vient de la création de multiples opportunités de division au sein des groupes autour des différentes visions du monde, entraînant des scissions. Ces divergences, comme nous venons de voir, rendent stériles des débats ou des discussions qui pourraient pourtant être constructifs. Un exemple, est au sein du féminisme où différentes interprétations concurentielles [en parallèle, pseudo-indépendant] rentrent en conflit, dues notamment à des différences ontologiques fondamentales. Ces différences compliquent, entre autre, les discussions autour de la question de l’identité. Par ailleurs, on observe au sein des différentes méthodes d’organisation politique, des visions spirituelles et religieuses divergentes qui coexistent difficilement.
Un autre enjeu est l’aspect identitaire des nombreuses positions existant aujourd’hui. Notre société, et la culture dominante (voir le texte sur la culture) , atomisent la population en ménages, appartements, couples ou familles, permettant, entre autres, une démultiplication des pratiques, croyances et rapports au monde, notamment par la décorrélation au niveau social de ces espaces entre eux. Un effet réactif apparaît dû à ces divisions. Les personnes se sentent plus seules et cherchent un moyen de faire communauté. Ces pratiques deviennent alors un critère commun pour faire corps. De fait, une composante identitaires s’ajoute à ces pratiques, accentuant les risques et les complexités mentionnés ci-dessus car ces échanges touchent maintenant l’identité même des interlocuteurices. Ceci est autant applicable à des groupes militants écologistes que des platistes [personnes pensant que la terre est plate]. Malgré ces différences, le capitalisme ou le système réussit en abstrayant cette echelle individuelle à uniformiser par ailleurs les pratiques qui lui importent, comme la consommation de biens ou de services.
Pour finir, un dernier enjeu est celui des externalités de ces pratiques, croyances et mœurs. Cela inclut les injustices sociales qu’elles peuvent favoriser ainsi que leurs effets directs sur la santé physique ou mentale. Certaines peuvent également avoir un caractère sectaire, comme l’anthroposophie 1 L'anthroposophie est un mouvement initié par Rudolf Steiner, qui prône une vision spirituelle du monde et de l'être humain.
. Pour toutes les raisons citées ci-dessus, ces risques et dangers sont difficilement abordables. Et lorsque l’échange constructif n’est pas possible, le risque de violences augmente.
Pour résumer, les enjeux des questions ontologiques et cosmologiques sont notamment notre capacité à nous organiser collectivement, socialement et politiquement, ainsi que des externalités non souhaitables difficilement abordables, intriquées dans des mécanismes identitaires.
Concrètement la position matérialiste du Mallouestan
Pour éviter les problèmes que nous venons de voir et expliquer comment le Mallouestan y pallie, explicitons notre position. Le Mallouestan s’ancre dans une ontologie réaliste, ce qui veut dire que nous considérons qu’une réalité existe indépendamment de nous. Plus exactement, nous adhérons à une vision matérialiste du monde, ce qui signifie que nous pensons que tout est matière ou les propriétés de cette matière. Cette position implique plusieurs choses qui peuvent être listées simplement comme ci-dessous :
- Nous croyons que le monde physique qui nous entoure est anté-prédicatif (qu’il précède le raisonnement), autrement dit qu’il existe avant et indépendamment de notre conscience ou psyché.
- Nous ne croyons pas à la notion d’âme, d’esprit ou de réincarnation.
- Nous ne croyons pas à des formes d’énergie isolées des lois physiques.
- Nous ne croyons pas en le surnaturel ou en un monde céleste, quel qu’il soit.
Notre position utilise un concept primordial, celui de “condition matérielle”, ce qui veut dire les différents mécanismes physiques et matériels (constitués de matière) composant ce qui existe. L’identité d’un objet, d’une chose ou d’une personne est définie grâce aux conditions matérielles nécessaires à son existence réelle. Un concept ne pouvant être décrit par des conditions matérielles est considéré comme subjectif et irréel. Par exemple, un concept comme une interaction sociale, à première vue, semble difficilement définissable au travers de “mécanismes physiques et matériels”, mais, au contraire, elle dépend, entre autres, d’une activité neurologique, hormonale, biologique, de vibrations d’air et d’énergies dépensées à de multiples niveaux, elle dépend également de condition matérielles historique comme la socialisation de l’individu, qui comprend entre autre dans certaines interractions la langue parlé, la classe sociale, l’éducation et les expériences propres. Elle est effectivement difficile à définir de manière exhaustive, mais il est possible de le faire. Une interaction sociale fait donc partie de la réalité.
L’identité d’une personne, tout comme celle d’un objet, dépend de conditions matérielles. Nous ne pensons pas qu’une personne choisisse son identité, mais que, au contraire, son identité est l’intersection de multiples conditions matérielles externes. Autrement dit, nous ne considérons pas qu’une personne ait une intériorité, et nous pensons que l’identité est une conséquence avant d’être un choix.
Nous adhérons à la méthode scientifique sans pour autant “adhérer à la science”, ce qui, pour nous, est un non-sens grammatical. La science est un terme-valise qui ne veut pas dire grand-chose. Si par science on entend l’argument d’autorité du “testé en laboratoire” ou les études citées sans rigueur, nous nous y opposons. Nous reconnaissons et décrions les biais de la privatisation et de la monétisation de la recherche.
Par ailleurs, nous ne prétendons pas que la science explique tout et nous considérons que de nombreuses choses existent probablement qui sont incompatibles avec le modèle actuel que la science a du monde. La méthode scientifique est, quant à elle, souvent incomprise, notamment due aux vices que nous venons d’évoquer. En ce qui nous concerne, la méthode scientifique permet de tester si quelque chose existe. Autrement dit, elle permet de vérifier qu’une matérialité sous-tend la chose qu’on étudie. C’est seulement dans un deuxième temps, qu’elle permet de chercher les conditions matérielles définissant l’objet d’étude.
Prenons un exemple: le cas d’un nouveau phénomène de soins. Prétendument, dans notre exemple, le fait de manger du cacao le soir avant de dormir soignerait la dépression clinique. Comment savoir si c’est vrai, si c’est réel, si des conditions matérielles sous-tendent cette affirmation ? Grâce à la méthode scientifique 2 La méthode scientifique est un ensemble de techniques et de protocoles permettant de tester des hypothèses et de vérifier la réalité d'un phénomène. Elle est souvent méprise comme cherchant avant tout à expliquer le monde, alors qu'elle cherche avant tout à vérifier la matérialité de ce qui est avancé. Par exemple, la méthode scientifique peut être utilisée pour tester l'efficacité d'un traitement médical ou d'une pratique de soin. C'est seulement dans un second temps qu'elle peut chercher à expliquer comment cela fonctionne, si cela fonctionne.
, nous pouvons établir un protocole pour vérifier. Prenons par exemple un grand nombre de personnes d’origine, d’âge, de classe sociale et de cultures diverses, et testons l’affirmation.
Ici, on ne cherche pas à expliquer comment le cacao aide ces personnes, mais bien si elle aide. Ce détail est primordial, car on nous prête parfois l’idée que nous croyons seulement ce que nous comprenons, et que, de fait, nous avons une vision étriquée. Mais ce n’est pas le cas. Nous croyons être réel ce qui se vérifie, même si on ne comprend pas pourquoi. Par ailleurs, nous savons que de nombreuses choses qui n’ont pas pu être vérifiées encore existent sûrement, mais nous choisissons en attendant de ne pas admettre leur existence si nous ne les considérons pas suffisement probable.
Là intervient une autre nuance fondamentale. Admettre l’existence ou non d’une chose est, pour nous, fondamentalement différent dans une sphère collective qu’un contexte individuelle. Cela veut dire que ce qui est admis collectivement comme vrai prime sur les croyances individuelles dans les moments collectifs. Au Mallouestan, une personne peut croire conceptuellement ce qu’elle veut, mais cela n’a pas de valeur à l’échelle du collectif si ce n’est pas vérifiable. Pourquoi minimiser autant cette subjectivité?
Cela permet de définir les concepts de manière claire, au travers des conditions matérielles, et de minimiser les différentes interprétations, permetant d’unifier le champ conceptuel collectif, ainsi que le langage que nous partageons. Nous minimisons ainsi la subjectivité individuelle dans ce qui cadre le collectif. Dans le cadre de conflits, cette position permet plus facilement de décider collectivement ou de trancher sur le fait de mettre ou non de l’huile essentielle de Tea-tree dans nos repas du soir. Le matérialisme permet ainsi d’augmenter notre cohérence. Les concepts que nous utilisons deviennent solides (car elle ne sont pas aussi libres d’interprétation) et exportables. Nos visions politique et philosophique sont, à leur tour, plus solides. Cela ne veut pas dire qu’elle ne contiennent pas d’erreurs, ou quelle ne sont pas carrément fausses mais qu’elles sont finie et cadrées. Justement, au-travers de cette solidité, notre vision du monde est plus facilement abordable, questionnable et réfutable. Une chose que notre vision encourage.
Notre opposition à l’ésotérisme
Ce qui vient d’être énoncé rend peut-être presque évidente notre opposition à l’ésotérisme. Ce que nous entendons par ésotérisme, ce sont les croyances spirituelles, énergétiques, chamaniques, les croyances de sorcellerie, celles liées au New Age, de théosophie 3 La théosophie est un mouvement ésotérique qui cherche à comprendre la nature divine et les lois universelles, souvent en mélangeant des éléments de différentes religions et philosophies.
, et de nombreux autres courants. Dans cette partie, nous allons expliquer aussi clairement que possible cette opposition et apporter les nuances nécéssaires. Synthétisons les arguments que nous avons déjà énoncés, mais pour le cas précis de l’ésotérisme.
Premièrement, l’ésotérisme, dans sa majorité, est souvent centré autour de la subjectivité, de ce que l’individu ressent, perçoit, et de son existence transcendentale 4 Quelque chose de transcendantal est quelque chose qui dépasse les limites de l'expérience humaine et qui est souvent associé à une dimension spirituelle ou divine.
. L’ésotérisme encourage donc un champ conceptuel individuel où la vérité est propre à la personne qui la perçoit et qui, dans certains cas, est même définie et structurée par la personne elle-même, qui, au travers de certaines pratiques, pourrait même façonner cette réalité. Tout ceci encourage une approche où, collectivement, la réalité ou la vérité devient difficilement caractérisable. Le monde qui nous entoure se retrouve difficilement définissable et abordable dans un cadre collectif. Ainsi, les échanges, la discussion constructive, nécessaires aux nombreux consensus inhérents à la vie collective, deviennent alors, comme nous l’avons vu, quasiment impossibles.
On pourrait dire que c’est le cas de toute croyance. Or ce n’est pas si évident; la religion, par exemple, accentuant moins une vérité subjective, et à donc des croyant-es avec une perception du monde similaire. Les choses sont moins normatives dans le cas de l’ésotérisme. Tant bien même que les termes soient les mêmes, qu’une certaine partie de la narrative semble être compatible, chacun et chacune, derrière chaque idée, y met sa propre interprétation quelle que soit l’incompatibilité avec le ou la voisin-e.
Continuons à appliquer ce que l’on a vu à l’ésotérisme. Les croyances qui composent l’ésotérisme sont souvent impliquées avec le système qu’elles sont censées, en tout cas pour une partie, décrire ou remplacer. Effectivement, ces pratiques nécessitent dans bien des cas de nombreux ingrédients, gadgets et accessoires que le système capitaliste propose. Dans le cas de l’homéopathie, la lithothérapie ou l’aromathérapie 5 L'aromathérapie est une pratique qui utilise les huiles essentielles pour prétendument soigner ou améliorer la santé. Nous ne croyons pas à son efficacité, et nous pensons qu'elle peut être dangereuse, notamment en cas de surconsommation ou d'utilisation inappropriée des huiles essentielles. Cela ne veut pas dire que les huiles essentielles n'ont pas d'effets mais que le modèle de l'aromathérapie n'est pas vérifiable et que les effets sont souvent exagérés ou non prouvés scientifiquement.
, ce sont des ingrédients qui dépendent d’un marché mondialisé et de chaînes industrielles, au même titre que de nombreux laboratoires pharmaceutiques. Dans le cas de soins énergétiques, comme le reiki, ce sont des expert-es, parfois appelés “élu-es”, qui, de par leur faible nombre, se voient obligés de facturer leurs formations, livres ou contenus en ligne. Ce ne sont que quelques exemple de marché qui par ailleurs ne sont pas seulement compatibles mais alimentant le système.
Ces pratiques dépendent également du système, mais d’une façon moins directe. Ces pratiques, tout au moins leur popularité, viennent entre autres d’un mal-être généralisé. Ce dernier pouvant naître de plusieurs facteurs, comme nous l’avons mentionné précédemment, l’organisation sociale de notre système, ou des nombreux autres aspects aliénants et incompatibles avec notre épanouissement, comme nous avons pu le développer dans les textes sur le rapport au confort ou notre opposition à la technologie.
Enfin, nous avons également vu qu’au travers de notre approche matérialiste, comme au Mallouestan, nous admettons comme réel ce qui peut être étayé et ce qui est vérifiable. De nombreuses études sur des populations étendues, vérifiées par de nombreux pairs, ont été réalisées dans l’optique de montrer ou non, l’efficacité de telle ou telle pratique ésotérique. Ces études n’ont pas pu vérifier leur efficacité. Dans la majorité des cas, les résultats de ces pratiques sont quasi identiques avec une partie de la population étudiée, dit de contrôle, à qui on a fourni un placebo ou un-e acteur-ice dans le cas de soins. Pour autant, cela ne veut pas dire que cela n’existe pas. Mais en attendant une preuve ou un moyen de vérifier la réalité, la matérialité de ce qui est avancé, nous préférons au Mallouestan s’abstenir.
Nous pensons néanmoins que le mode de vie préconisé et prêché au sein de ces croyances et des milieux y adhèrant est souvent sur de nombreux points plus sain que le mode de vie adopté par la majorité. Nous partageons même de nombreuses idées et conclusions que ces milieux peuvent véhiculer. Par exemple, nous pensons qu’un rapport au corps plus sain, une écoute de soi plus attentive, une attention à la nature et à l’environnement, ainsi qu’une approche plus empathique des relations sociales sont des choses positives. Nous pensons que ces pratiques peuvent être bénéfiques pour les personnes qui les pratiquent, mais surtout nous pensons que ces pratiques sont bénéfiques pour le collectif.
Mais, et pour le coup, c’est un grand mais, nous voyons également les dangers que ces pratiques représentent. Prenons un exemple qui s’est produit au Mallouestan. Une personne nous a appellé, nous décrivant une situation où un chien blessé est allongé et couine tellement sa blessure à la jambe est importante. La situation décrite ressemble à une fracture et le chien s’est probablement cassé la jambe. La personne nous demande conseil. Elle nous écoute, nous lui conseillons d’aller voir un vétérinaire. Mais l’échange se conclu car nous sommes interrompus et la personne raccroche après nous avoir expliqué qu’une solution avait été trouvée. Un chirurgien énergétique était arrivé et allait s’occuper de soigner l’animal.
La personne nous rappelle quelques heures plus tard. Ils sont sur la route d’un vétérinaire. L’animal est très mal au point, et le soin énergétique ne semble pas avoir solutionné le problème. Ceci a eu lieu au sein d’une ZAD, avec de nombreuses personnes autour acceptant une telle situation. Un animal a souffert et aurait pu être aidé plus rapidement. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a jamais de problème de prise en charge chez le vétérinaire, ou des biais médicinaux et industriels dans ce milieu de soin. Nous ne dirons pas le contraire, mais dans cet exmple, nous considérons qu’un animal a souffert pour rien. L’animal a dû être euthanasié car avait perdu trop de sang.
Prenons un autre exemple qui s’est produit au Malouestan. Une personne se confie sur un traumatisme qu’elle a vécu récemment, une agression sexuelle. Une des personnes qui l’écoute, en parlant de l’agresseur et de la victime, explique que ce n’est pas de la faute de l’agresseur. Que cette action a eu lieu, que cet événement s’est produit, parce que il y a une bonne raison qui la sous-tend. Et que si la victime le vit négativement, c’est de sa faute. Que par ailleurs, cela s’est produit probablement car la victime en avait besoin. Nous avons demandé à la personne de quitté le lieu en lui expliquant en vain la gravité de ses propos.
Ce ne sont que quelques exemples se produisant régulièrement autour de nous. Heureusement pas toujours au Mallouestan, mais nos visiteuseurs et membres rapportent souvent des récits similaires. On voit bien que ces pratiques peuvent être dangereuses. Elles peuvent accentuer des injustices sociales et elles peuvent mettre en danger des individus. Ce ne sont donc pas simplement des croyances personnelles. Elles ont un impact à l’échelle collective. Elles ne doivent pas être sous-estimées, selon nous.
Pour conclure
Dans ce texte, nous abordons les notions qui peuvent paraître abstraites d’ontologie et de cosmologie, en expliquant leurs enjeux, notamment dans le contexte de l’organisation collective, qu’elle soit sociale, politique ou militante. Effectivement ces notions sont à la base de notre rapport au monde. Nous expliquons la position ontologique du Mallouestan: le matérialisme. Nous expliquons que le Mallouestan ne croit pas à un monde immatériel; qu’il voit l’identité d’une personne ou d’une chose comme un ensemble de conditions matérielles. Nous expliquons également la position à l’égard de la science, malgré une retenue sur le terme en tant que tel, que nous décrions comme étant fourre-tout. Nous expliquons pourquoi nous adhérons à la méthode scientifique, et en quoi elle nous permet de vérifier la matérialité et de fait la réalité ou non d’un concept ou d’une chose.
Nous concluons par une explication sur notre opposition à l’ésotérisme où nous expliquons que ces croyances peuvent rendre difficile l’échange et la discussion constructive, qu’elles sont, contrairement à ce qu’elles peuvent prétendre, profondément ancrées et dépendantes du système, et qu’elles peuvent représenté un danger physique et mental à l’égard d’individus surtout à une échelle collective.
Notes
- L’anthroposophie est un mouvement initié par Rudolf Steiner, qui prône une vision spirituelle du monde et de l’être humain.
- La méthode scientifique est un ensemble de techniques et de protocoles permettant de tester des hypothèses et de vérifier la réalité d’un phénomène. Elle est souvent méprise comme cherchant avant tout à expliquer le monde, alors qu’elle cherche avant tout à vérifier la matérialité de ce qui est avancé. Par exemple, la méthode scientifique peut être utilisée pour tester l’efficacité d’un traitement médical ou d’une pratique de soin. C’est seulement dans un second temps qu’elle peut chercher à expliquer comment cela fonctionne, si cela fonctionne.
- La théosophie est un mouvement ésotérique qui cherche à comprendre la nature divine et les lois universelles, souvent en mélangeant des éléments de différentes religions et philosophies.
- Quelque chose de transcendantal est quelque chose qui dépasse les limites de l’expérience humaine et qui est souvent associé à une dimension spirituelle ou divine.
- L’aromathérapie est une pratique qui utilise les huiles essentielles pour prétendument soigner ou améliorer la santé. Nous ne croyons pas à son efficacité, et nous pensons qu’elle peut être dangereuse, notamment en cas de surconsommation ou d’utilisation inappropriée des huiles essentielles. Cela ne veut pas dire que les huiles essentielles n’ont pas d’effets mais que le modèle de l’aromathérapie n’est pas vérifiable et que les effets sont souvent exagérés ou non prouvés scientifiquement.